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Le plagiat

Techniques et risques

Ca commence toujours de la même façon: tu as un papier à rendre dans quatre jours et pas la moindre idée de ce que tu vas bien pouvoir écrire. En plus, le sujet ne te motive pas, l'air de la bibliothèque te donne des allergies, et la soirée bien arrosée du samedi soir a décimé tes neurones. Situation désespérée? Peut-être pas. Franchement, qui a besoin d'un cerveau quand on a Internet?

Plagier n'a jamais été aussi facile. Nos ancêtres passaient des heures à dénicher le livre rare traitant du bon sujet et s'esquintaient les yeux en recopiant les précieux passages à la lumière d'une bougie. Aujourd'hui, assembler un document de 60 pages est aussi simple que de lâcher un commentaire sur Facebook (et je parle de l'ancien Facebook). Le seul problème est que cette pratique demeure très mal vue par les professeurs. Le plagiat est assimilé à la fraude, et la fraude est punie par un zéro si tu as de la chance et par l'exmatriculation si tu n'en as pas… de quoi y réfléchir à deux fois avant de te lancer ! Pour la plupart des étudiants, ça n'en vaut vraiment pas la peine. Mais si tu es vraiment désespéré, ou si tu rêves secrètement de te faire renvoyer de l'uni pour commencer une vie d'artiste à Bali, ou encore si tu es l'une de ces personnes qui achètent un ticket d'Euromillions une fois par an, «quand la cagnotte est vraiment grande», alors on a préparé pour toi un aperçu des techniques les plus répandues de plagiat. A tes risques et périls…

CTRL -C/CTRL -V

La technique :
Tu sais sans doute que, si on donne à mille singes mille machines à écrire pendant mille ans, ils finiront par taper tous les grands chefs-d'oeuvres de l'humanité – et donc aussi ton travail à rendre. Eh bien, sache qu'avec un seul singe équipé d'un ordinateur connecté à Internet, ça marche aussi. Et si tu n'as pas de singe, tu peux très bien le faire toi-même, à condition de savoir utiliser les moteurs de recherches.

Le risque :
Les professeurs ont développé des parades contre ce genre de triche simpliste. En plus de Google (oui, on peut aussi l'utiliser contre toi), il existe des services spécialisés qui ne recensent pas seulement des sites web, mais aussi des livres, des travaux académiques et des revues spécialisées. On n'arrête pas le progrès…

La paraphrase

La technique :
Le début est le même que pour la technique précédente, mais ensuite la subtilité est de modifier légèrement chaque phrase pour déguiser le larcin. Utilise le Larousse des synonymes pour t'inspirer, ou écrire comme Yoda aussi tu peux. Si tu te sens vraiment à l'aise avec le sujet, tu peux même oser une inversion de paragraphes de temps en temps.

Le risque :
Tu as moins de chances de te faire prendre qu'avec la copie pure et dure, mais n'oublie pas que tes correcteurs connaissent la matière (et donc aussi les écrits dont tu peux «t'inspirer»).

L'exploitation de l'homme par l'homme

La technique :
Pourquoi voler le travail de parfaits inconnus quand tu peux pirater celui des gens que tu connais ? C'est peut-être aussi ça, les fameux «soft skills» dont on te parle tout le temps. L'idéal est évidemment de piquer le classeur de ton grand frère qui a eu le même cours que toi il y a quelques années (en espérant que la malhonnêteté n'est pas transmise génétiquement et que son travail à lui n'est pas du plagiat). Sinon, si tu es l'un de ces étudiants qui arrivent en cours en Audi, tu peux toujours payer le fils d'ouvrier brillant, qui paie ses taxes d'études en enchaînant les petits boulots, pour qu'il fasse le travail à ta place.

Le risque :
Si tu rends le travail piraté tel quel, sans y toucher, le risque est assez minime, sauf grande malchance (le prof ou l'assistant indéracinable qui a aussi suivi le travail de ta soeur...). Par contre, si tu n'en prends que des petits bouts, les différences de style (et de contenu...) sauteront vite aux yeux du correcteur aguerri.

Le plagiat ultime

La technique :
Si tu as trop peur de te faire prendre, cet article te révélera en exclusivité la technique de plagiat, garantie indétectable. D'abord, tu dois prendre plusieurs auteurs à pirater, disons cinq ou six. Ensuite, tu dois copier non pas auteur par auteur, mais thème par thème (essaie d'en dégager trois ou quatre importants). Mélange-les à tes propres pensées pour être plus indétectable. Parles-en à tes amis, peut-être te donneront-ils des idées. Si les travaux originaux contiennent des expériences, essaie de les répéter ou de les améliorer pour les mettre dans ton travail. S'il y a des exemples, essaie d'en trouver des semblables. Mélange le tout et récris au propre.

Tu as fini ton plagiat ? Excellent. Maintenant, il ne te reste plus qu'à le mettre dans une enveloppe, l'envoyer à la poubelle, et écrire ton propre travail. Tu verras, ce sera beaucoup plus facile maintenant. Et à l'intérieur de toi, tu pourras jubiler: la forme la plus retorse et en même temps la plus élégante de plagiat reste quand même de faire quelque chose d'original.