Sens dessus dessous

les histoires d'alice: deuxième et dernière partie d'un essai d'une étudiante chilienne en formation de français moderne à l'université...

Ces derniers jours nous avons fait travailler au maximum nos cerveaux, pour faire de notre fête le grand événement du siècle.

L'ambiance est cathartique; les amis un peu vifs dans les mouvements, la stridence du son me fait craindre l'effondrement du plafond. En effet, ce dernier donnait l'impression de s'amuser autant que nous et de suivre la cadence. Je crois vraiment participer à un anniversaire de singes.

Brigitte prend ma main pour un micro et braille aux quatre vents un vieux classique de Madonna. Nous sommes les starlettes de la soirée et, pour honorer un tel statut, nous nous jetons avec emportement dans une danse effrénée. Je sens que mon coeur va exploser tellement il bat fort, et subitement cette sensation de joie infinie me rappelle l'irréfutable destin de la pomme de Newton; néanmoins, je ne m'arrête pas, tout en sachant que les dégâts de la chute sont proportionnels à la hauteur atteinte. C'est là que j'entends Brigitte murmurer à mon oreille

- Y a Mark qui arrive !!!
- Zut !!!

Mark, le meilleur ami du frère de ma copine, était mon répétiteur quand j'avais 10 ans; lui en avait cinq de plus que moi.

Charmant, à l'égal d'un prince, il était le plus beau garçon de tout le quartier, celui qui faisait perdre la tête à toutes les filles.

Ce que me plaisait chez lui, ce n'était ni son visage d'ange, ni ses beaux yeux pervenche, ni ses lèvres de feu, ni même son corps de rêve, ce que j'adorais c'était les effluves de sa peau, son regard intelligent et pénétrant, la justesse de ses mots et la pertinence de ses silences.

En un millième de seconde, c'est le désert à l'intérieur. Face à moi un grand écran tombe du ciel et j'y vois le dernier chapitre de mon histoire avec lui.

L'été s'achevait, et à partir d'un certain moment les maths n'étaient plus l'objet de nos rencontres. Nous étions à la plage, étendus sur le sable, la chaleur accablante ornait nos formes de sueur, et chaque gouttelette augmentait mon désir, d'autant plus que sa respiration frôlait ma figure.

Il caressait mon dos, ses yeux cloués dans les miens. Avec le regard, je lui ai signalé les vestiaires et il a esquissé un petit sourire entendu.

En profitant de l'absence des amis, nous nous y sommes rendus. Je tremblais, peut-être parce que j'étais extrêmement éprise de lui ou plus probablement parce que je n'étais qu'une jeune fille en train de trouver des astuces de femme.

Lorsqu'il a posé ses lèvres sur les miennes, j'ai compris à quel point mon corps vierge avait besoin d'être exploré. D'une manière sensuelle, je me suis déshabillé, et lui tel un loup affamé s'est lancé sur moi. La suite fut une vraie bataille, où la douleur s'est mêlée au plaisir. Corps à corps pendant un instant sublime, nous avons fait partie de la même matière. Trois jours plus tard il est parti à l'étranger, je ne l'ai plus jamais revu, je n'ai plus jamais eu de ses nouvelles. - Salut Alice, euh ça fait un bon moment - Euh oui, bientôt une année...