Pascal Couchepin

à l'occasion des votations du 21 mai, le ministre de l'intérieur répond aux question d'etudiants.ch

Le haut niveau de qualité et la création de filières de formation ouvertes et souples sont les objectifs directeurs pour l'ensemble du système de formation. La juxtaposition des systèmes cantonaux et des domaines réglés par la Confédération doit faire place à un système cohérent et transparent («espace suisse de formation»). A l'avenir, la Confédération et les cantons piloteront ensemble le domaine des hautes écoles, facilitant ainsi l'harmonisation des niveaux d'enseignement, du passage de l'un à l'autre, de la reconnaissance des institutions et des diplômes et des principes de financement. Les cantons restent souverains en matière d'instruction publique. La Constitution leur impose néanmoins de coopérer entre eux et avec la Confédération.

Monsieur le Conseiller fédéral, le 23 février 2006, vous avez lancé cette campagne en compagnie de votre collègue Joseph Deiss: est-ce la fin de ce gigantesque puzzle de la formation suisse?
Non. Ce n'est d'ailleurs pas le but visé. L'article constitutionnel sur la formation respecte la diversité du système éducatif suisse tout en l'adaptant aux conditions nouvelles de notre société. Par exemple, la situation actuelle pénalise les familles qui déménagent d'un canton à l'autre. Les nouveaux articles constitutionnels permettront une harmonisation des systèmes de formation et faciliteront la mobilité élèves et de leurs parents.

La Suisse fait partie du peloton de tête au niveau de la formation, de la recherche et de l'innovation. Ces prochaines modifications doivent renforcer cette position. Pensez- vous qu'elles rendront le Pays encore plus attractif en terme de formation?
Une bonne place n'est jamais acquise. Il faut s'améliorer sans cesse, surtout si l'on prétend être reconnu sur le plan international. Et si l'on veut donner toutes leurs chances aux nouvelles générations. Une collaboration plus efficace entre les cantons et la Confédération est d'abord un atout pour les étudiants. S'ils sont satisfaits, l'attractivité de la formation en Suisse progressera.

Ce projet représentera-t-il également sur le plan financier des économies d'échelle visibles?
Globalement, la réforme n'a pas d'incidence sur le plan financier. La coordination accrue entre les cantons et la Confédération donnera une vue d'ensemble sur le système. Et pour la première fois, on prendra en compte simultanément tous les niveaux de formation, primaire, secondaire, tertiaire. Cela permettra d'affecter les moyens là où ils sont les plus nécessaires. Je pense par exemple à l'encadrement des étudiants dans les universités.

Pour certaines personnes, la crainte de cette nouvelle collaboration entre Confédération et cantons est de voir les bureaucrates faire de la pédagogie?
Cette crainte n'a aucun fondement. Nous voulons harmoniser les conditions- cadres, pas le contenu des enseignements. L'article constitutionnel fixe d'ailleurs clairement les domaines concernés par cette harmonisation: date du début des cours, âge de l'entrée à l'école, objectifs généraux de l'école, conditions pour le passage d'un niveau d'enseignement à un autre, reconnaissance des diplômes.

Nous avons assisté ces derniers mois au débat du choix de la deuxième langue obligatoire. Ce projet permettra-t-il de trancher la question plus facilement? La Confédération pourrait-elle alors imposer une deuxième langue nationale?
C'est aux cantons de trouver un accord. La solution élaborée par la Conférence des Conseillers d'Etat en charge de l'éducation a de bonne chance de réussir. La population de Schaffhouse vient de l'adopter. Cela veut dire deux langues étrangères à l'école primaire, dans l'ordre souhaité par les cantons. C'est une bonne solution. Il est donc tout à fait possible que la Confédération n'ait jamais à intervenir sur cette question. Elle ne le fera que si les cantons le lui demandent.

Monsieur le Conseiller fédéral, ce projet de modification ne semble pas trop faire de vague. Pourtant on sait que les Suisses sont attachés à leur système de formation. Pourrait-on alors s'attendre à une surprise au soir du 21 mai?
J'ai toujours dit qu'il ne faut ne pas se fier aux apparences. Mais je pense que c'est un projet qui a toutes les chances de s''imposer. Il s'explique facilement. Il fait appel au bons sens. Il arrive au bon moment. Et il répond aux attentes des familles et des jeunes. Les gens comprennent qu'il ne s'agit pas d'une centralisation mais d'une réforme adaptée à notre temps.

Au niveau des Hautes écoles, quelles sont les principales incidences de ce projet?
La coopération va être renforcée entre Confédération et cantons, mais aussi entre écoles polytechniques, universités et hautes écoles spécialisées. Un organe commun Confédération/ Canton traitera les questions concernant l'ensemble des Hautes écoles. C'est une nouveauté importante.

Beaucoup de réponses sont fournies sur le site «Espace suisse de formation», mais auriez-vous encore des points à avancer, notamment pour les jeunes en formation dans les Hautes écoles? par exemple en terme de formation continue?
La formation continue est mentionnée pour la première fois dans la Constitution. Nous ne voulons pas intervenir financièrement dans un marché qui fonctionne. Nous nous occuperons par contre de la qualité et des certifications.

... et dès le 22 mai, en cas d'une acceptation par le peuple de ce projet, quels seront les futurs chantiers de la Confédération liés à la formation?
En ce qui concerne l'école primaire, les cantons vont mettre en oeuvre le projet «Harmos» dans les domaines mentionnés par la Constitution. Leur projet est en consultation jusqu'en novembre 2006. Si tout se passe bien, la Confédération n'aura pas à intervenir. Au niveau tertiaire, nous mettrons en consultation, fin 2006, la nouvelle loi-cadre sur les Hautes écoles. Troisièmement, nous mettrons en chantier une loi sur la formation continue qui réglera la qualité, les certifications et la reconnaissance de diplômes. Au-delà du sujet «21 mai», voici encore quelques questions liés à notre lectorat.

Pensez-vous qu'un super-département de la formation puisse voir le jour en Suisse?
Oui. Mais il implique un changement des structures de plusieurs départements. Cela ne sera pas simple.

Que faudrait-il encore faire pour améliorer la compétitivité des Hautes écoles au niveau international?
L'autonomie des hautes écoles est un élément clef de leur compétitivité. Elles doivent saisir toutes les opportunités leur permettant de renforcer leur efficacité et les collaborations entre elles.

En tant qu'observateur privilégié de l'évolution sociale et économique actuelle, quel message souhaitez-vous transmettre à nos lecteurs?
Ayez plaisir à apprendre et à rencontrer des professeurs, des étudiants, en Suisse et partout dans le monde. Etudier n'est pas seulement utile. Cela peut donner aussi sens à la vie. Les années d'études sont une très belle période de la vie.