Virtual ONU

une semaine de simulation pour faire mieux que les grands

Nucléaire iranien, enquête sur l'assassinat du Premier ministre libanais Hariri, l'Organisation des Nations Unies bourdonne comme une ruche, car notre monde connaît bien des soubresauts. Pendant ce temps, une ONU virtuelle a préparé la relève du 4 au 10 mars à Genève. Le principe: étudiants de tous les pays, simulez! Ainsi, 186 représentants venus d'une quarantaine de pays ont enfilé le costume du parfait diplomate pour le Geneva International Model United Nations (Gimun).

Comme à la télé
Lancé il y a sept ans par des élèves de l'Institut universitaire de hautes études internationales, cet avatar onusien oblige chacun à se mettre dans la peau de l'Etat qu'il représente. L'unique condition, c'est de ne pas arborer les couleurs de sa patrie d'origine. Toute simulation qui se respecte (elles sont 400 par année dans le monde) pose cette exigence. Alors, on découvre, stupéfait, qu'une Chinoise représente la Suisse à l'Organisation mondiale du commerce, ou qu'un Hollandais bataille pour la Russie au Conseil de Sécurité. Peu crédible? Quoi qu'il en soit, les lustres du Palais des Nations confèrent aux débats une indéniable «reality touch».

Les six organes du Gimun, depuis le Haut Commissariat pour les réfugiés jusqu'à la Conférence sur le Désarmement, suivent scrupuleusement la procédure réelle. Prise de parole, formule de politesse, temps de micro, traduction simultanée, tout y est. Inutile de mentionner le port obligatoire du costard. Chaque délégué se tient sous les ordres d'un ambassadeur, qui s'assure que son pays négocie de façon cohérente dans les différents workshops. Cerise sur le gâteau, un journal imprimé quotidiennement informe tout ce petit monde des derniers développements.

Mais au-delà des convenances, les thèmes abordés brûlent d'actualité. Il faut dire que, dans le monde des grandes personnes, l'ONU navigue en pleine réforme. Beaucoup de ses critiques la trouvent ramollie, voire complaisante envers les dictatures. Qu'en est-il lorsque des étudiants prennent les commandes ? Reportage au front.

Situation de crise
Matin pluvieux sur le Palais des Nations. Les mesures de sécurité à l'entrée mettent tout de suite dans le bain. Ici, c'est du sérieux.

Après tout, il s'agit du second siège de l'ONU après New York. La première étape passe par le Conseil des Droits humains.

Dans cette vraie simulation, une fausse éruption volcanique dans la région des Grands Lacs a créé une crise humanitaire et politique majeure. Les membres doivent agir au plus vite pour éviter l'embrasement de la région. La tension est palpable lorsque le délégué congolais demande pourquoi la décision tarde tant. L'assemblée décide enfin de saisir le Conseil de Sécurité.

Pause café, lecture des dernières dépêches, et on repart pour un tour. Le Conseil de Sécurité, justement. Le délégué rwandais annonce que si personne ne lève le petit doigt, son gouvernement envahira l'est de la République démocratique du Congo pour rétablir l'ordre. Émoi dans l'assemblée, qui se prononce heureusement pour un envoi supplémentaire de casques bleus. Le pire semble évité.

Pourtant, le visiteur ne perçoit qu'une partie du processus. Les négociations en coulisses mettent les vrais/faux délégués sous une intense pression. Car chaque workshop doit déboucher sur un accord avant la fin de la semaine. Alors, les tractations se poursuivent autour d'une bière jusqu'à tard dans la nuit. On se prend à imaginer Colin Powell payant un whisky triple sec au représentant irakien dans un bar de Greenwich Village, quelque part au printemps 2003. Leurs homologues de synthèse ont plus de savoir vivre.