HEPIA, pour la société de demain

une approche intégrée du développement durable

Hepia - Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture est née de la réunion de l’eig - Ecole d’ingénieurs de Genève et de l’eil - Ecole d’ingénieurs de Lullier. Vous rêvez de créer, de construire et de faire évoluer la société? Résolument axées sur la notion de technologies au service de la gestion optimale des moyens et des ressources, les formations HEs délivrées par hepia veulent répondre à ces attentes.

Son directeur depuis janvier 2009, Yves Leuzinger, est ingénieur en environnement et coordonne la mise en oeuvre de la création de la nouvelle école. Rencontre.

M. Leuzinger, quelle place donnez-vous à la composante du déveLoppement durable dans votre offre de formation?
La gestion et l’économie des ressources sont les composantes indispensables de tout projet capable d’apporter sa pierre au développement durable. Fort de ce constat, nous avons adopté une valeur institutionnelle qui dit en substance: hepia développe des savoirs et des compétences dans les technologies et les procédés au service du développement durable.

Pour notre institution, cela ne veut en aucun cas signifier que nous devons donner des cours spécifiques et une matière sèche concernant le développement durable. Nous avons l’impression que de nombreuses institutions continuent à travailler comme avant mais ajoutent simplement une couche en fin de parcours. Nous voulons casser ce principe et instaurer dans toutes nos formations une approche spécifique totalement intégrée et imprégnante pour les étudiants. Comme les protections contre les accidents font partie des machines-outils depuis des décennies, la gestion et l’économie des ressources doivent être des composantes normales de tout projet. Nous incluons dans cette approche tant les ressources minérales, énergétiques, génétiques ou de tout autre type. Il est évident qu’elle ne comprend pas toutes les facettes du développement durable. Il nous paraît pourtant essentiel que des ingénieurs, architectes, paysagistes ou gestionnaires de la nature associent de manière automatique la notion environnementale et énergétique dans leur façon d’aborder les projets; l’intégration de toutes les composantes du DD éloignerait par contre les étudiants de leurs compétences métiers. Il faut dès lors trouver un équilibre: conserver ces dernières de manière forte tout en permettant des orientations innovantes et une ouverture d’esprit plus large.

Nous devons insister pour que tous nos partenaires comprennent que ce n’est pas la technologie qui apportera la solution. C’est en effet une erreur, une manière de moins se responsabiliser, de croire qu’elle résoudra nos problèmes. Les solutions viendront avant tout par des mutations importantes des comportements individuels et de l’organisation de société, notamment dans les villes et les zones urbaines. Le développement de nouvelles technologies sera nécessaire pour implémenter ces changements et elles pourront aider à mettre en oeuvre les options prises. Ceci aussi, nos étudiants doivent le saisir et bien percevoir que cette affirmation revalorise leur métier. Dorénavant, comme ingénieur et scientifique, nous osons aussi poser des questions et nous ne sommes pas seulement là pour répondre à des attentes parfois llusoires. C’est dans cette perspective qu’hepia se réorganise aujourd’hui afin de permettre à l’institution d’être au service de la société de demain.

Parlez-nous de quelques projets académiques marquants qui s’inscrivent dans cette lignée...
L’exemple le plus immédiat consiste en un partenariat entre l’école et le département des constructions de l’Etat de Genève. Nous sommes en effet locataires dans des bâtiments qui ne sont pas des modèles en matière d’utilisation des ressources. De même, tant le personnel que les étudiants, nous avons des comportements qui ne sont pas, et de loin, exemplaires dans notre vie au quotidien dans ces locaux. Nous allons combiner les objectifs du département, les compétences des professeurs et des étudiants et stimuler tous les utilisateurs pour changer notre comportement et apporter les investissements nécessaires aux infrastructures pour être plus durables. Ainsi, cette imprégnation se fera à travers de ce qui peut être présenté comme un agenda 21 de l’institution. Les diplômés qui sortiront d’hepia seront alors autant de multiplicateurs de cette philosophie et ceci pour toutes les filières.

Un deuxième exemple consiste à promouvoir, dans une école qui offre pas moins de 9 filières Bachelor, des projets et des semaines thématiques transversales. En effet, la confrontation de différents savoirs et la diversité des approches en fonction du vécu des personnes permettent généralement d’aboutir à des solutions innovantes en matière de gestion et d’économie des ressources. Comme on le voit, il ne s’agit pas de donner des thèmes spécifiques, mais bien d’intégrer ces notions dans tout travail.

Sentez-vous les nouveaux étudiants plus sensibles aux thématiques environnementales?
J’ai un sentiment mitigé. D’une part cette problématique est très présente car les problèmes augmentent et les médias en parlent beaucoup. De l’autre, les jeunes sont en général rattrapés par une société qui offre une consommation facilitée, tant pour les déplacements que pour les loisirs ou les biens. Dès lors le comportement est généralement peu compatible avec la prise de conscience qui les caractérise.

De manière générale, pensez-vous que les hautes écoles suisses se montrent exemplaires en matière de développement durable?
Justement, une école estelle exemplaire parce qu’elle dispense des cours avec une dimension développement durable ou parce qu’elle fait construire ses bâtiments selon des normes énergétiques? Je pense que nous devons aborder cette question en termes d’effet sur les étudiants et de notre capacité à former des personnes responsables. Dans ce sens, nous avons un long chemin à parcourir car il ne s’agit pas de proclamer notre intérêt, ouvrir quelques cours ou encore rénover nos bâtiments. La pensée globale dont on parle si souvent doit céder la place à l’action globale, y compris dans nos institutions.

L’offre des hautes écoles est-ell e aujourd’hui suffisante pour répondre aux besoins du tissu économique?
La recherche effectuée dans les hautes écoles a pour but de trouver des solutions et de mettre en contact l’économie et la société avec nos chercheurs. Dans ce sens les HES peuvent aider le tissu économique et les services dans les régions où nous sommes ancrés. Cette composante, la décentralisation et notre positionnement régional, a de nombreux avantages. Nous pouvons développer un réseau de compétences, des liens avec les entreprises et jouer un rôle fort dans la société. Pour cela nous devons communiquer dans cette optique et en assumer les conséquences: une grande indépendance pour la formation et une certaine souplesse dans notre gestion du volet Ra&D. De même nous devons être à l’écoute des besoins de formation continue de tous nos partenaires et être proactifs dans l’adaptation de nos offres de formation.

Grâce au système dual, je pense ainsi que l’offre en Suisse est suffisante. Toutefois nous pouvons encore améliorer la collaboration. Pour certains domaines de l’ingénierie, c’est l’attractivité auprès des jeunes qui faiblit. Même s’il y a du travail assuré, un métier captivant et des salaires tout à fait intéressants, certaines études ne font plus rêver. Il est certainement réjouissant que les jeunes souhaitent rêver, aujourd’hui plus que hier, et approcher leur métier avec un fort sentiment d’accomplissement personnel. On peut s’en féliciter certes, mais c’est aussi contradictoire; les technologies du futur ont besoin de femmes et d’hommes avec un fort bagage technique et scientifique. A nous de savoir rendre nos formations plus attractives, mais il est aussi important que les médias rendent leurs lettres de noblesse aux branches scientifiques.