l’aide au développement en Afrique de l’Est

Un moyen intéressant de s'immerger dans une autre culture

Me voilà dans la région de Kagera, la plus retirée et la plus rurale de Tanzanie, coincée entre le Lac Victoria, l'Ouganda et le Rwanda.

C'est pour moi l'occasion de faire un stage pour le moins exotique, ici à Omurushaka. Employé par la DDC (Direction du Développement et de la Coopération), je travaille dans une ONG locale, CHEMA Programme (Community Habitat Environmental Management) qui est active dans une vingtaine de villages de la région. Le but est d'y améliorer la gestion des ressources naturelles, comme les arbres, l'eau ou les sols, qui sont souvent mal gérées et problématiques dans la vie de tous les jours.

Je m'occupe d'un projet de cuisinières à bois efficaces énergétiquement, économisant ainsi du bois et réduisant les émissions de CO2. Le but du projet est, à long terme, d'être financé par le marché de carbone. 70% de la déforestation en Tanzanie est en effet due à la récolte de bois comme combustible, ce qui donne à ce projet un impact potentiellement très élevé. Remplaçant la méthode traditionnelle, constituée d'un feu entre trois pierres sur lesquelles on dépose la casserole, ces fours sont destinés à être utilisés dans chaque foyer de la région, dans un premier temps. Ils utilisent environ 2 fois moins de bois, et au-delà des économies de CO2, ils améliorent la vie des villageois, en particulier des femmes qui s'occupent de ramasser du bois (elles y passent en moyenne plus de neuf heures par semaine). La cuisine est généralement une petite hutte en bois très enfumée et nocive pour la cuisinière, ce qui donne au nouveau four un avantage supplémentaire: il diminue la fumée et peut même la supprimer complètement!

Le projet a démarré il y a un an, à l'initiative de deux autres étudiants de l'EPFZ, qui ont comme moi fait un stage ici. C'est eux qui ont eu l'idée et qui ont créé un prototype, alors que mon travail est d'assurer la qualité de production, de commencer la distribution dans les villages, et de préparer le dossier de certification pour le marché volontaire du carbone. Par exemple, si vous achetez un billet d'avion et que vous décidez de le «compenser» en CO2, il se peut que vous financiez indirectement un projet comme celui-là.

En dehors de ce projet, j'aide où je peux être utile, comme à l'amélioration de la qualité des puits.

La vie ici est très tranquille. La ville d'Omurushaka est grande pour la région, alors qu'elle ne compte que trois mille habitants environ. Ça donne l'impression de quelques maisons agglutinées au bord d'une route poussiéreuse. Il n'y a pas grand chose à y faire; on trouve ce qu'il faut pour vivre, mais pas plus. Excepté les téléphones portables bien sûr, qui, décidément, s'imposent jusque dans les endroits les plus reculés...

Il n'y a presque aucun touriste ( je n'en ai vu aucun dans le coin depuis mon arrivée, il y a un peu plus d'un mois ) et on est vite repéré en tant que «mzungu» (européen, blanc). Ce n'est pas toujours agréable: difficile de faire quoique ce soit sans se faire interpeller. En se promenant dans la rue, en faisant les courses au marché ou même en travaillant, impossible d'y échapper! Mais on s'y fait, et on finit par ne ( presque ) plus entendre les commentaires...

Il y a quelques autres volontaires européens dans une autre ONG et à l'hôpital, ce qui permet de partager ses impressions de temps à autre. Cela dit, il n'y a pas à se plaindre, les Tanzaniens sont très ouverts et amicaux, et l'avantage du «mzungu», c'est d'être toujours invité: mariages, soupers chez les voisins, pour jouer du tam-tam, chanter et danser chez un petit vendeur du coin...

Bien que certaines personnes parlent anglais, impossible d'entrer en communication avec la plupart des habitants sans savoir un peu de swahili. J'ai été prévenu à l'avance et j'ai donc appris autant que possible. Ça ne m'a pas empêché de chercher mes mots au début, mais je commence à bien me débrouiller. La plupart des personnes du staff de l'ONG  aîtrisent bien l'anglais, heureusement, et m'aident lorsque c'est nécessaire.

En dehors du travail, il n'y a pas grand chose à faire, mais la vie a un autre rythme. Tout ici, sans exception, prend beaucoup de temps: cuisiner? Il faut trier le riz (toujours plein de petits cailloux ou résidus du genre). Chercher des informations sur Internet? Il faut avoir de l'électricité et de la patience. On s'y fait vite, même si pour le travail, ce n'est pas toujours évident à gérer: l'artisan est toujours censé venir «demain», mais il faut l'attendre une semaine, et ainsi de suite.

Globalement, je suis jusqu'à présent très satisfait de mon expérience, et surpris de l'accueil qui m'est réservé et qui me permet de découvrir un peu de la vie locale de l'intérieur. Découvrir une autre culture dans le cadre d'un stage, tout en apportant, si possible, quelque chose aux habitants locaux, c'est ce que je voulais, et si vous y songez, je ne peux que vous encourager à le faire!