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L’Unil bien adaptée ?

Interview de Nathalie Janz, adjointe de la Direction à l’Université de Lausanne

Savez-vous combien d'étudiants en chaise roulante fréquentent l'établissement?

Les étudiants en situation de handicap souhaitent être considérés comme n'importe quel étudiant et nous respectons leur point de vue. Aussi, nous ne dressons ni liste, ni statistique concernant le handicap en général ou tel handicap en particulier.

Pensez-vous que l'Unil soit bien adaptée aux personnes en chaise roulante?

Globalement, le campus de Dorigny est adapté pour les personnes en chaises roulantes. L'Université de Lausanne se situe sur un campus à plusieurs niveaux, ce qui peut constituer une difficulté à quelques endroits pour les personnes en chaise manuelle. Cela dit, de nombreux aménagements ont été effectués pour rendre les bâtiments, les auditoires, les salles de cours et les toilettes plus accessibles: les commandes d'ascenseurs ont été abaissées, des portes automatiques ont été installées, des plateformes spécifiques pour personnes en chaises existent dans les auditoires en pente, le mobilier a été déplacé pour faciliter les accès aux salles, des toilettes ont été agrandies, la signalisation a été optimisée, etc.

Peut-on espérer des avancées?

Les aménagements ponctuels se poursuivent dans les anciens bâtiments. Les nouveaux, par exemple Géopolis, sont construits selon les normes en vigueur. Un rapport a été établi par les experts d’ id-Geo, spécialistes des questions d'environnement et de handicap, sur l'accessibilité du site et de ses bâtiments. Nous avons suivi leurs propositions d'améliorations, ces aménagements étant répartis sur plusieurs années, la Direction de l'Université de Lausanne réservant une partie de son budget à cet effet. Un suivi de l'avancement des travaux a également été établi par id-Geo qui a mis en exergue une amélioration significative de l’accessibilité du campus de Dorigny. Je souhaite que ces efforts se poursuivent, ce qui est par ailleurs la volonté de la Direction.

Quelles améliorations souhaitez-vous adopter afin de leur rendre la vie plus agréable?

Les étudiants en situation de handicap bénéficient d'une aide personnalisée auprès du responsable de chaque faculté qui traite, au cas par cas, les demandes spécifiques d’aménagement du plan d’études et des examens et je réponds également aux questions générales.

Je leur souhaite aussi de trouver de la solidarité auprès des autres jeunes en formation. Une association d'étudiants pour aider les personnes en situation de handicap (prise de notes, aller chercher des livres à la bibliothèque, accompagnement dans les déplacements d'un bâtiment à l'autre) a d'ailleurs été mise sur pied.

Est-ce que ces personnes bénéficient de soutien sur le campus? De quel type?

Le Site de l’Unil réunit depuis début 2002 les coordonnées des personnes de contact, le plan d’accès du site, des témoignages d’étudiants en situation de handicap, des liens utiles vers des associations spécialisées ainsi que la possibilité pour tout étudiant de signaler des bons plans (par exemple, des conseils aux futurs étudiants aveugles ou malvoyants).

Les étudiants en situation de handicap ont la possibilité, depuis la rentrée académique de 2010, de réaliser leurs études de Master à temps partiel (50%).

En décembre 2010 et en février 2012, les collaborateurs de l’UNIL en lien avec les étudiants en situation de handicap ont eu la possibilité de suivre une sensibilisation/formation pour mieux comprendre et aider les personnes en chaise roulante, les aveugles et malvoyants ainsi que les personnes sourdes ou malentendantes. Nous avons donc "professionnalisé" notre aide aux étudiants.

Depuis 2011, tous les étudiants en situation de handicap, ou intéressés par les questions qu’il suscite à l’Université de Lausanne, sont invités à participer à une discussion générale où ils ont la possibilité de s’informer sur les moyens à disposition, sur les travaux effectués et où ils ont l’opportunité d’émettre des suggestions.

 


Interroger la normalité ?

Sébastien Kessler écharpe cheveux bruns

En situation de handicap récurrente, Sébastien Kessler participe aux travaux d’associations de défense et d'autodétermination ainsi qu'à des groupes de travail (politique sociale et légale, barrières architecturales, transports, etc.), il est membre du conseil de Defitech – fondation axée sur la promotion de la recherche et le développement de nouvelles technologies devant répondre aux besoins de personnes atteintes d’un handicap – et associé auprès de la société de conseil id-Geo notamment comme formateur d'adultes.

 

Que pensez-vous des améliorations effectuées à l'Unil ces dernières années?

L'Unil est exemplaire en Suisse Romande, y'a pas photo. J'ai observé et vécu l'évolution depuis le début de mes premières études dans les années nonante, c'est fantastique les résultats aujourd'hui atteints. Depuis plusieurs années déjà, l'Unil a conscience que l'accès aux études ne se limite pas à l'architecture mais qu'il s'agit d'avoir une vision globale.

Quelles solutions avez-vous pour rendre accessibles les universités aux personnes à mobilité réduite?

La transversalité des solutions apportées aux étudiants: cela va de la prise de notes aux règlements et conditions particulières d'examens en passant par l'accès au centre sportif et les transports au sein du campus dans les heures de grande affluence. Une entreprise externe comme la notre amène un regard supplémentaire, un conseil quasi holistique et des solutions interdisciplinaires qui transcendent les services, les chapelles de toute organisation complexe: les bonnes solutions sont souvent amenées par ce regard neuf et transversal. Par ailleurs, il convient d’être à l'écoute en temps réel des étudiants tout au long de leur semestre, et pas seulement au début par exemple ou en cas d’échec; sans oublier qu'il y a aussi des employés en situation de handicap! Enfin, le rôle joué comme partenaire par les associations ou fondations est également riche de potentialités et fondamental dans le développement et le soutien individuel.

D'après-vous, en fait-on suffisamment pour l'intégration des jeunes en situation de handicap physique dans les hautes écoles suisses?

Vaste question! A mon sens, le canton de Vaud pourrait insuffler davantage mais il faut bien constater que l'évolution se fait en fonction des directions de chaque institution: il y a des très grandes différences si l'on regarde l'ensemble des hautes écoles d'un canton donné. Inscrire l'étudiant - ou l'élève dans l'école inclusive - de manière durable dans un circuit ordinaire, c'est adopter une vision «normale» de l'étudiant dans le sens que chacun est un être à «besoins spécifiques» et qu'il n'y a pas à faire de distinction. D'ailleurs, qu'appelle-t-on un étudiant handicapé? Savez-vous qu'en Amérique du Nord, on recense depuis 2 à 3 ans davantage d'étudiants dit à besoins spécifiques pour les troubles de l'attention et de l'apprentissage que d'étudiants universitaires en fauteuils roulant ou sourds?