Plume ou fusil

On connaît le scénario: se voir forcé d'abandonner son travail en cours, prendre les armes et s'embarquer dans une aventure en direction des lieux les plus reculés de Suisse.

Bien souvent, malgré l'attrait folklorique, l'obligation militaire est un fardeau aussi encombrant que le paquetage du soldat. Beaucoup d'étudiants sont forcés de manquer leurs cours pour partir sous les drapeaux. Ecole de recrue ou simplement cours de répétition, l'armée pèse lourd au sein du cursus universitaire. Une fois embarqué, le dépaysement est garanti, la caserne, c'est un tout autre esprit que l'uni: plus question de penser par soi-même, il s'agit désormais de suivre les instructions. Bref, il faut «switcher»; assimiler le contraste entre la vie civile et militaire, accepter de se mettre au kaki sans rechigner. La disharmonie entre armée et études ne se situe cependant pas uniquement au niveau des valeurs; il est en effet techniquement difficile de les coordonner.

Dans l'étau de deux réformes
Depuis la réforme de l'armée qui prolonge de plusieurs semaines l'école de recrue, il n'est plus possible d'enchaîner gymnase, armée et uni dans la même année. Autrefois, le bachelier passait son été sous les drapeaux en ne manquant qu'une semaine d'uni; depuis armée XXI, l'école de recrue s'étant alourdie, notre bachelier se voit forcé de manquer plusieurs semaines à la rentrée. La difficulté de concilier service militaire et études s'accroît encore avec le nouveau calendrier académique induit par Bologne. Le calcul est à la portée de tous: l'école de recrue dure entre 18 et 21 semaines alors que les vacances d'été ont été réduites à 14 semaines. Si notre bachelier-recrue persiste à vouloir enchaîner gymnase, armée et uni dans la même année, il loupera au minimum 4 semaines de cours à la rentrée académique, chose bien fâcheuse. Voici quelques solutions pour éviter ce déplorable cas de figure.

Comment harmoniser armée et études?
Il est possible, depuis la réforme, de fractionner son école de recrue en deux parties. Cette solution a été pensée pour rendre la conciliation entre armée et études plus aisée. Ainsi notre recrue pourra effectuer une partie de son service durant les vacances d'été, commencer l'uni en bonne et due forme et non en uniforme, puis finir son service pendant les vacances de Noël avec un probable chevauchement à la clé. Notre recrue manquera ainsi les cours après les fêtes, ce qui paraît tout de même moins fâcheux que d'être absent au début de l'année académique.

Deuxième possibilité pour notre recrue: s'armer de courage et opter pour le service long qui dure 300 jours. Cette alternative présente l'avantage d'enchaîner la totalité des jours de service. Au bout d'une année intensive, le soldat est débarrassé définitivement de ses obligations militaires. La corvée de ressortir son paquetage chaque année lui sera ainsi épargnée. Dans la mesure où les cours de répétition annuels de trois semaines sont un fardeau non négligeable, cette solution présente un avantage indéniable.

Bien qu'il soit plutôt conseillé d'enchaîner directement le gymnase et l'uni pour ne pas perdre le rythme estudiantin, l'option de l'année sabbatique s'offre toujours à notre recrue. Après ses cinq mois d'armée, il pourra profiter de son temps libre pour faire un séjour linguistique ou un voyage avec l'argent gagné.

Si aucune de ces propositions ne convient à notre bachelier contraint au service, il peut encore espérer se faire réformer lors du recrutement qui, depuis la réforme, dure deux ou trois jours. Il faut savoir que durant le recrutement - sorte de loft-story version kaki - notre jeune homme sera méticuleusement observé et que déjà à ce stade son destin militaire sera déterminé par les instructeurs. Ce n'est pas une rumeur, le recrutement, avec ses entretiens et ses tests, est devenu le lieu de repérage des futurs gradés. Pour celui qui ne veut pas faire carrière avec son fusil, mieux vaut donc commencer à traîner les pieds déjà lors du recrutement.

Folklore annuel
Malgré le durcissement amené par armée XXI, il demeure passablement aisé pour les étudiants de faire sauter leurs cours de répétition. Heureusement, sinon notre soldat serait obligé de retourner trois semaines sous les drapeaux chaque année! Il suffit d'avoir trois examens dans les trois mois qui suivent la date d'entrée en service pour pouvoir repousser son cours. Au risque de se retrouver à jouer du fusil jusqu'à quarante ans!